Sport News Africa: En quelle année avez-vous commencé à pratiquer le taekwondo ?
Parfait Hakizimana : C’était en 2004. Le début n’a pas été facile à cause de mon handicap. Avec un bras invalide, je devais faire plus d’efforts que les autres, d’autant plus qu’au Burundi, il n’y avait pas une catégorie propre pour nous handicapés. En plus de cela, c’est un sport qui demande d’avoir des jambes et des bras solides. Je dois alors avouer que c’est grâce à mon coach, Eloi Ndizeye, que j’ai pu continuer la pratique du taekwondo. Il m’a donné de bonnes bases et je le remercie pour tout.
Arrivé au camp de Mahama, étiez-vous sûr de pouvoir continuer le taekwondo ?
Dès notre arrivée, on n’était pas sûrs du lendemain, et c’était difficile de pratiquer du sport. Mais quelques jours après, les sportifs se sont mis ensemble et on a commencé à s’entrainer. Nous avons réussi à réunir plusieurs jeunes et le sport nous a aidés à surmonter la situation compliquée dans laquelle on était.
Est-ce facile de faire du sport dans un camp de réfugié ?
Pas du tout ! Dans le camp, c’est difficile d’avoir du matériel, un espace adapté ou encore de la nourriture suffisante et de qualité pour faire du sport, et de surcroît les arts martiaux. Les autorités du camp nous ont beaucoup encouragés, puisque le sport jouait un rôle important dans l’encadrement de la jeunesse. C’est grâce à ces mêmes autorités que j’ai, par exemple, pu participer à des compétitions organisées à Kigali. Sans ces concours, il était impossible de quitter Mahama pour venir à Kigali.
Quel a été l’apport de la Fédération rwandaise pour votre sélection ?
Franchement sans le soutien de la Fédération, je ne serais pas là où je suis aujourd’hui. Suite à l’agrément de notre club « Mahama Taekwondo Academy », nous avons régulièrement été invités pour participer à des compétitions tant nationales qu’internationales. Et c’est grâce à ces compétitions que j’ai pu étaler mon talent. J’ai marqué beaucoup de points et c’est sans nul doute ce qui m’a permis d’être sélectionné pour représenter les réfugiés dans ces Jeux paralympiques de Tokyo. Je dois tout à la Fédération rwandaise de taekwondo. C’est elle qui communiquait chaque fois avec la Fédération internationale à mon sujet.
Comment vous-êtes-vous senti quand la nouvelle est tombée ?
J’ai été surpris. J’étais fou de joie. Pour moi, Parfait, j’ai vu que mon statut allait changer. Participer aux Jeux Paralympiques en tant que réfugié, qui pouvait y penser ? Pour le moment, mes amis, mes coéquipiers, tous m’admirent. Je pense qu’ils seront devant la télévision le 3 septembre (ndlr: date de son entré en lice à Tokyo) pour me suivre. Je leur demande de prier pour moi pour que cette occasion puisse m’ouvrir d’autres horizons.
Quel est ton objectif à Tokyo ?
Parfait Hakizimana : Je pars à Tokyo pour représenter mes frères et sœurs réfugiés avec qui nous partageons les mêmes problèmes de vivre loin de nos familles dans la misère totale. Je dois les représenter valablement. En tant qu’ambassadeur des réfugiés, je dois tout faire pour gagner une médaille.
Quel message lanceriez-vous aux réfugiés burundais ?
Les réfugiés rencontrent au quotidien des problèmes divers et difficiles à résoudre mais ils doivent garder espoir. C’est d’ailleurs notre devise au camp de Mahama. Un jour l’asile prend fin, raison pour laquelle ils doivent se battre tous les jours pour une vie meilleure. Et ils en sont capables.
Désiré Hatungimana
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